![]() |
Le pont dAinay en 1894 |
Historien et géographe de formation, Jean Pelletier dispense à Lyon de 1958 à 1994 un enseignement universitaire axé sur deux spécialités : la géomorphologie et lenvironnement et lurbanisme. Depuis une décennie, il consacre une large part de son temps à lhistoire urbaine de sa ville natale. Les rues de Lyon, les arrondissements, les ponts et prochainement les inondations constituent tour à tour les sujets de plusieurs publications et contributions.
Les fonds des Archives départementales du Rhône et des Archives municipales lui ont permis de réaliser lhistoire des ponts de Lyon qui ne pouvait être abordée quavec un regard double : celui du géographe pour les conditions naturelles, et de lhistorien pour les vicissitudes politiques et économiques. Dans le cadre de cette exposition, est présenté un document inédit qui rappelle le passé à la fois familier et déjà lointain de nos rives lyonnaises
* * *
Lexposition universelle tenue à Lyon en 1894 a donné loccasion à la ville administrée par le docteur Gailleton de montrer aux visiteurs des éléments caractéristiques de la cité.
Parmi ceux-ci les ponts jouent un rôle stratégique car le développement urbain fut de tout temps tributaire de leur présence et de leur nombre. La municipalité le sait bien puisquelle vient de dépenser six millions de francs or, cent vingt millions actuels, de 1888 à 1893 pour la reconstruction sur le Rhône des ponts Morand, Lafayette et du Midi (Galliéni) par les services techniques de la ville dirigés par lingénieur Ernest Fabrègue.
Aussi, à loccasion de l'exposition de 1894, la ville présente un ensemble de textes consacrés aux travaux de ses services dont une trentaine de pages concernent les ponts existants. Cette notice est accompagnée de deux atlas photographiques de première importance, représentant respectivement les ponts de Saône et du Rhône. Les clichés sépias sont de grandes dimensions (65 cm x 45 cm) et remarquablement nets. La longueur du temps de pose entraîne cependant labsence déléments en mouvement sur leau, devinés seulement par quelques ombres floues.
Lune de ces planches représente le pont dAinay photographié de lamont et de la rive gauche de la Saône sur le quai Joffre actuel. Ce pont, destiné à relier Ainay à la Quarantaine, a eu trois versions. Le premier ouvrage terminé en 1749 par les Hospices fut détruit en 1793-1795. Le troisième édifié de 1897 à 1899 dans une version métallique de lépoque fut complètement détruit, piles comprises, en septembre 1944 et ne fut pas reconstruit, fait unique pour lensemble des ponts de Lyon.
La photographie montre la seconde version de ce pont, peu de temps avant sa démolition pour cause de vétusté ; il était concurrencé par la passerelle Saint-Georges qui unissait des quartiers plus peuplés, surtout sur la rive droite. Ouvert en 1818, il était interdit aux voitures depuis 1890 et seuls les piétons lempruntaient. Cette interdiction se justifie quand on analyse, grâce à la photographie, ses techniques de construction caractéristiques du début du XIXe siècle et utilisées à peu près à la même époque pour la mise en place du pont de Serin.
Les piles nombreuses pallient limpossibilité dédifier des arches de grande portée. Leur apparence en pierres est trompeuse car les fondations, constituées de pieux en chêne ou châtaignier enfoncés dans leau supportent un plateau immergé qui sert de base à la maçonnerie. Les arches dorigine, en bois, sont supportées par des arbalétriers en porte à faux. Normalement, ce dispositif provisoire devait être remplacé par la pierre, ce qui fut vite réalisé au pont de Serin mais pas au pont dAinay en raison du coût élevé de la dépense compte tenu de sa faible fréquentation. En témoignent des désordres apparents et un vieillissement prématuré des arches.
Sur la rive gauche, la petite tour en pierres abritait avant 1860 le poste de péage et plus tard, un poste de garde de la police.
Bibliographie
Jean PELLETIER, Lyon pas à pas : son histoire à travers les rues, Roanne, Le Coteau, Horvath, 1986, 222 p.
Jean PELLETIER, Les ponts de Lyon. Leau et les Lyonnais, Roanne, Le Coteau, Horvath, s.d. [1990], 207 p.
Jean PELLETIER, Lyon : connaître son arrondissement. Le 2e, Lyon, Éditions lyonnaises dart et dhistoire, 1998, 96 p.
À paraître
Jean PELLETIER, Lyon : connaître son arrondissement. Le 5e, Lyon, Éditions lyonnaises dart et dhistoire, 2001, 120 p.
Jean PELLETIER, " Les crues de 1840 et 1856 de la Saône et leurs conséquences sur le domaine urbain ", actes du colloque La Saône, axe de civilisation, Mâcon, février 2001.